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Zhenzhen Li observe des embouteillages de particules confinées

Dynamique de l’obstruction d’un canal par des particules en situation de confinement.

Gulliver
groupe Microfluidique, MEMS, Nanostructures
www.mmn.espci.fr

Voir l’animation en ligne

Qui n’a jamais pesté contre les embouteillages qui apparaissent dès qu’il y a trop de voitures sur une route trop étroite ? Sachez que vous n’êtes pas seuls : toutes sortes de gouttes et de particules solides partagent votre calvaire.

C’est ce phénomène, appelé clogging, que Zhenzhen étudie. Pour cela, elle injecte une suspension de particules solides de taille microscopique dans de l’eau, qu’elle fait passer à travers un tuyau étroit : la largeur du canal fait trois à quatre fois le diamètre des particules. Selon le nombre de particules et la vitesse d’injection, elle peut alors observer, d’une part, s’il se forme un embouteillage dans le tuyau (et dans ce cas, essayer de déterminer pourquoi), et d’autre part, si les particules se disposent spontanément les unes par rapport aux autres de façon particulière. Les recherches de Zhenzhen sur le clogging permettront peut-être d’optimiser ce mécanisme, qui possède notamment des applications en biologie.


Mais ce n’est pas le seul projet de recherche de Zhenzhen : une part importante de ses travaux est consacrée à l’étude du phénomène de focus capillaire. Dans un canal beaucoup plus large que haut, elle fait s’écouler un filet d’huile qu’elle encadre par deux filets d’eau. Les fluides débouchent sur un orifice reliant le canal à un réservoir bien plus large : à cet endroit, l’eau confine l’huile en un tout petit filet de liquide. Grâce à la force capillaire – la même qui retient l’encre d’une cartouche tenue à l’envers – l’huile et l’eau arrivent à se séparer en gouttelettes au niveau de l’orifice.

L’intérêt de cette méthode du focus capillaire réside dans le fait que les gouttelettes ainsi créées ont toutes exactement la même taille. Ainsi, on peut leur trouver de nombreuses applications pratiques. On peut notamment encapsuler des particules plus petites dedans. Par exemple, cela permet d’enfermer une molécule d’ADN dans chaque goutte, ce qui en permet une analyse plus facile. La pharmacie peut également profiter de ces avancées : en effet, en encapsulant les médicaments dans des gouttes, on évite qu’ils réagissent avec d’autres molécules avant d’être libérés et on peut mieux choisir à quel endroit du corps humain ils seront délivrés...


Les recherches fascinantes que mène Zhenzhen relèvent d’un domaine récent : la microfluidique – la science de l’écoulement des fluides à l’échelle microscopique, c’est-à-dire sur des distances de l’ordre du millionième de mètre ! Les canaux dans lesquels elle étudie les phénomènes de clogging ont donc des tailles comprises entre le micromètre et le millimètre. Zhenzhen les fabrique dans des galettes en silicium d’une vingtaine de centimètres de diamètre, appelées wafers. Mais puisque ces canaux sont si fins, une simple poussière suffirait à les boucher : c’est pourquoi elle réalise les wafers dans une salle blanche, où l’atmosphère est maintenue vierge de toute poussière. Ainsi, pour ne pas en apporter de l’extérieur, les chercheurs qui souhaitent y entrer doivent porter une blouse, une charlotte et des surchausses.

Un wafer de silicium en cours de fabrication - on y distngue les circuits de microfluidique qui seront employés par Zhenzhen pour ses recherches

Mais comment Zhenzhen en est-elle venue à observer des embouteillages de particules confinées ?

Petite, elle accompagnait son père, géologue, collecter des roches dans la montagne. Il y avait chez elle une grande armoire pleine de minéraux. D’autre part, elle a eu assez tôt un intérêt pour les mathématiques. Elle s’est alors tournée vers la science parce qu’« on vit entourés de technologies, et que cela donne envie de comprendre ».

Après avoir passé l’équivalent du Bac en Chine, elle a eu envie de découvrir le monde. Elle a alors choisi la France, en profitant d’un programme d’encouragement à la mobilité pour venir faire deux ans d’études à l’UTC de Compiègne, une école d’ingénieurs proposant une formation tournée vers les besoins de l’industrie. Plus attirée par la recherche, elle est ensuite devenue élève à l’ESPCI grâce à une admission sur titre. C’est d’ailleurs lors d’un stage dans les laboratoires de l’ESPCI qu’elle s’est initiée à la microfluidique.

Bien qu’elle ait été acceptée dans une école de médecine chinoise et qu’elle ait sérieusement envisagé une formation en géologie, Zhenzhen a finalement adopté la microfluidique. Elle pense rester dans la recherche ou bien se tourner vers l’industrie. Elle voit dans le métier de consultant une excellente opportunité de découvrir de nombreux sujets, mettant à profit l’ensemble de ses compétences scientifiques, et l’envisage également pour son futur.

Mais la recherche scientifique n’est pas son seul domaine d’excellence. Cette ceinture rouge de taekwondo pratique également la natation et l’équitation, mais aussi le monocycle. Et elle profite du fait de résider au cœur de Paris pour donner libre cours à sa passion pour le théâtre et les comédies musicales, en suivant des cours à l’Académie Internationale des Comédies Musicales !

Zhenzhen dans la salle blanche de l’ESPCI, observant le wafer de silicium qu’elle est en train de réaliser


Article rédigé par Guillaume DUREY et Alexis WEINREB,
élèves-ingénieurs de l’ESPCI ParisTech